La mort de la créativité humaine

Jeudi dernier, dans une jardinerie locale, ils vendaient des plantes carnivores.
Ça m'a fait pop direct dans ma tête.
Ce système de piège de la plante est extrêmement sophistiqué à mes yeux.
La mouche se pose sur la plante et elle est tellement attirée par l'odeur du nectar, qu'elle glisse gentiment dans le toboggan qui contient des poils.
Le clapet anti-retour, en fait.
C'est un piège diabolique.
Pourquoi cette mouche se laisse-t-elle berner par une vulgaire plante ?
Parce qu'elle croit qu'elle est libre, qu'à tout moment elle peut s'envoler.
Mais le truc, c'est que cette mouche est tellement gavée de nectar qu'elle devient trop lourde pour le faire.
Elle est prise au piège. C'est trop tard.
C'est un peu pareil dans nos consultations sur le net, avec des moteurs de recherche qui fonctionnent via un algorithme.
On nous met ce qu'on a besoin de voir pour prendre les décisions nous-mêmes (la partie tarmac de la plante)
On nous balance sous le nez des contenus irrésistibles qui orientent nos décisions (l'odeur du nectar)
On nous manipule discrètement par dose homéopathique (la tige poilée de la plante)
Mais en fait, à bien y regarder, les algos décident pour toi : de ce que tu vois, de ce que tu aimes, de ce dont tu as besoin.
Tu es cette mouche…
A t-on vraiment encore notre libre arbitre dans tout ça ?
Ce dont on va parler dans cette nouvelle newsletter, c’est comment l’algo te piège ?
Je sais pas si tu es comme moi, mais quand j'ai besoin de faire des recherches :
Je fonce sur Google.
Je tape un début de phrase
Et je constate que j'ai des suggestions qui apparaissent comme par enchantement.
La même chose sur YouTube, les e-mails avec les spams, tous les réseaux sociaux, Netflix, Waze et mes conversations avec ChatGPT.
Finalement, les algos sont partout dans chacune de nos recherches.
Ils leurs suffit de suivre une suite d'étapes dans un ordre précis, les additionner pour arriver au résultat attendu.
Comme un process, au fond.
Ça te rappelle rien ?
On rentre nos données, l'algo traite les données, il les additionne et le résultat s'affiche.
Ils travaillent tous ensemble sans sommeil ni vacances. Invisibles.
Le plus fou ?
Ils trient les résultats de nos recherches en fonction de nos préférences.
Pire, en fonction de ce qui est susceptible de nous captiver.
De sorte qu'à la fin, ton choix semblait être le tien.
Semblait ?!
Maintenant, quelle est ta part de responsabilité dans cette affaire, quand tu tapes ta requête ?
Tu donnes des mots-clés, des informations précieuses.
Tu donnes donc de la nourriture aux algos.
L'algol connait tes goûts, tes envies, tes comportements mieux que toi.
Comme un génie du marketing, il bosse sur son avatar : moi, toi, nous.
Et toi ?
Tu deviens aussi un algo.
Tu fais tes recherches, tu capotes, tu répètes le même process en mode automatique.
Tu suis les recommandations des résultats générés.
Alors on arrive à cette question : qui est le prédateur, qui est la proie ?
Là où tu mets du temps pour prendre une décision, lui, l'algo, il le sait déjà.
Là où tu hésites encore, lui, il le sait déjà.
Il a moins d'interrogations, l'algo.
Il a aucune émotion, aucun état d'âme.
Juste un algo qui t'endort avec son mode monsieur "oui/oui", pas contrarien.
À bien y regarder, il est l'ordre absolu, la maîtrise, le contrôle.
Alors je te repose la question : qui est le prédateur, qui est la proie ?
À quel moment la mouche perd-elle le contrôle ?
Et au fond, est-on encore maître de nos décisions ?
L'algo recherche l'efficacité quand toi, tu recherche le sens.
Lui, il veut prévoir l'avenir quand toi, tu veux rêver.
Lui, il veut être exact, précis quand toi, tu veux être surprise du résultat, d'une anomalie de ton hypothèse.
Nous, les solopreneuses, défions l'imprévisible, le chaos dans nos pensées, les fautes d'orthographe glissées dans cette newsletter, les bafouillages dans mon dernier podcast.
Et Madame la mouche, dans tout ça ?
En fait, la mouche ne perd jamais le contrôle, parce qu’elle ne l’a jamais eu.
Une piqûre de rappel pour te préciser que la perfection n'existe pas.
Les êtres humains sont imprévisibles.
Nous sommes libres.
Encore faut-il le rester.
C'est la raison pour laquelle je pars me sevrer 30 jours, une quête de silence, loin de l'algo, à partir du 7 juillet. Pour être libre de créer, de laisser mon algo personnel – c'est-à-dire mon cerveau faire des associations d'idées – trier et devenir prédateur de mes recherches, mes additions de pensées et mes résultats.
Je documente tout pour toi, ici.
Et si tu veux avoir les coulisses de toute mon aventure, tu peux rejoindre mon cercle privé ici : https://bit.ly/4kYpI5d
On avance ensemble.
Bisous chez toi.
Carine